Penser le compromis en contextes islamiques. La construction politique de la « différence » (Ihktilâf).
Mohamed Nachi
Il s’agira, entre autres, de discuter et de rendre explicites les conditions qui doivent être réunies pour que les sociétés islamiques se modernisent tout en restant fidèles à leurs héritages (turâth) et traditions, à leurs cultures et valeurs morales, c’est-à-dire en somme à construire des compromis viables entre leurs traditions et les exigences de la modernité avancée.
Élaborer des compromis peut être aussi une manière de congédier certains vieux démons qui guettent toute société : intransigeance des visions littéraliste et absolutiste des textes sacrés, refus de l’altérité, rejet de la différence et du pluralisme, etc. Dans cette perspective, penser le compromis relève d’un véritable défi, car c’est, sans doute, autour du renoncement à tout Absolu religieux et du respect d’un pluralisme actif favorisant le développement des processus de démocratisation que se sont cristallisés avec le plus de vigueur bon nombre de tensions dont l’apaisement passe justement par l’invention des figures de compromis ; ce que l’on propose d’appeler construction politique de la différence (Ikhtilâf).
C’est en définitive le compromis comme renonciation à la « solution parfaite » et comme rempart contre les formes d’extrémismes et la violence qu’il faut en faire un élément constitutif du vivre-ensemble. Un tel compromis devrait être perçu comme une promesse plutôt que comme une compromission.
Les soulèvements des peuples arabes et les processus de démocratisation en cours confèrent à cette exigence de penser le compromis comme une grande actualité.