La question climatique dans un monde globalisé est devenue une question centrale. Le dossier est issu d’un colloque consacré aux acteurs religieux, en l’occurrence chrétiens, face aux changements climatiques. Pour le christianisme, la question du climat n’est pas une nouveauté mais la manière de l’aborder ne cesse pas de se transformer.
Comme dans toutes les religions abrahamiques, dès la Création, le climat est étroitement lié au plan divin. Entre nostalgie du Paradis, moment d’équilibre et d’harmonie interrompu par la faute originelle, et crainte du Déluge, expression de la colère divine, le croyant a cherché à se tracer une voie qui le protège et à donner un sens aux dérèglements de la nature.
Mais au fil des mutations socio-culturelles, la référence au religieux évolue et le discours s’adapte comme en témoigne l’encyclique Laudato si’ du pape François (2015). L’explication par une sanction divine fait place à la volonté de cerner scientifiquement les causes et de contribuer à une éthique universelle dans une perspective écologique. Et la religion trouve dans cet engagement de nouvelles énergies.
Dans la continuité du dossier consacré aux relations entre laïcité et travail social (Hmc n° 39), ce second dossier est centré sur les questions rencontrées au sein des hôpitaux et plus largement par les personnels soignants. Introduit par une réflexion plus large sur la question du communautarisme, il examine le contexte et les modalités selon lesquelles se rencontrent et se confrontent attentes des patients et obligations des soignants, pour l’essentiel dans l’espace français, mais aussi au Québec.
n°42 - La politisation des clercs (XIXe-XXesiècles)
Réfléchir à l’entrée en politique des clercs, autrement dit sur leur politisation, c’est plus largement prêter attention aux relations entre religion et politique. Les clercs, parce qu’ils sont porteur d’une autorité́ religieuse, peuvent contribuer à̀ déplacer ces délimitations lorsqu’ils s’engagent. La politisation peut ainsi entre perçue comme une transgression du Role ou comme son aboutissement.
n°43 - De la tolérance à la laïcité (XVIIIe-XXe siècles).
Le XVIIIesiècle, en grande partie grâce à Voltaire, invente l’idée de tolérance et, plus encore, développe la volonté de la mettre en application. C’est dans ces décennies de lutte que sont posées les fondations de notre société actuelle. C’est aussi là que sont posées les germes de ce qui deviendra la « laïcité à la française » et qui sera formalisée deux siècles plus tard.
n°44 - Catholiques français et musulmans de la Première Guerre mondiale à aujourd’hui. Relations et regards mutuels.
Depuis un siècle les relations entre les deux confessions comme les regards portés sur l’autre croyant sont soumis à de vives controverses alimentées par la colonisation, la décolonisation, le contexte international. Il en résulte des incompréhensions persistantes, illustrées par les divergences en Algérie autour de la figure de Charles de Foucauld, mais aussi des essais de dialogue, hors de France comme en France.
Le travail social se trouve confronté depuis plusieurs années à l’affirmation revendiquée des appartenances religieuses, entre autres parmi les jeunes musulmans. Ces derniers obligent à mettre en œuvre la laïcité dans un contexte auquel les professionnels n’ont pas toujours été préparés.
Le dossier s’arrête d’abord sur le regard que notre société porte sur ces évolutions à travers le diagnostic de radicalisation dont il discute la pertinence et les effets. Puis il se place du côté de travailleurs sociaux et d’enseignants qui disent leur perception de ces manifestations du religieux, leurs réactions, leurs pratiques. Personnels investis dans la prévention, accompagnateurs de personnes chargées de l’aide à domicile, assistants sociaux, ils témoignent de leurs difficultés mais aussi de leurs initiatives. Par eux-mêmes et à travers leur collaboration avec des spécialistes en sciences humaines et sociales, ils montrent comment ces réalités nourrissent leur réflexion et font évoluer leur pratique.
Revendications d’identité de jeunes en voie de marginalisation, conversions où s’entremêlent révolte et volonté de combler un vide, comparaison entre les pratiques recommandées aux enseignants en France et à Berlin, brouillage de la frontière entre sphère publique et privée pour ceux qui accompagnent les familles : autant d’entrées pour prendre la mesure de la complexité des situations et inventer collectivement des réponses.
Publication : PIERRE GISEL Qu'est-ce qu'une tradition ?
Ce dont elle répond, son usage, sa pertinence
éd. Hermann ( site), coll. Le Bel Aujourd'hui, janvier 2017
Les sociétés contemporaines sont marquées par l’avènement de l’individualisme. Elles neconnaissent que les réalités individuelles et se révèlent oublieuses de toute tradition, religieuse ou culturelle. S’appuyant sur la reconnaissance de la pluralité des voies de l’humain, cet ouvrage préconise la mise en place de nouvelles conditions de confrontation : sans verser dans le communautarisme, il importe de reconnaître l’hétérogénéité des traditions et la fécondité des différends. C’est peut-être même la meilleure voie pour renouveler nos sociétés aujourd’hui. Mais quelmodederationalitépubliquefaut-ilmettreenplacepourparveniràdépasser le heurt des logiques diverses, voire divergentes ? Par-delà, comment repenser nos identités, nos rapports au passé et nos imaginations d’avenir ?
Pierre Gisel est professeur honoraire de la Faculté de théologie et de sciences des religions de l’université de Lausanne. Il travaille au croisement des sciences des religions, de la tradition théologique et des comparaisons interreligieuses.